Football.
Lionceaux de l’Atlas. Ah, les bons petits !
.............................................
L' equipe marocaine autour
de Bourqadi (maillot blanc),
se prepare a prendre le car
pour aller faire un decrassage
(A.K / Telquel)
Défaits en demi-finale, nos lionceaux ont malgré tout réussi un exploit à l’occasion de ce Championnat du Monde juniors. Rencontre avec une équipe jeune, métisse et soudée autour du coach Fethi Jamal.
...............................................
Ce mercredi à l’hôtel Mitland, où ils resteront avec l’Argentine, le Nigéria et le Brésil, jusqu’à dimanche, nos lionceaux ont les traits tirés. La défaite sévère de la veille, en demi finale du Championnat du Monde juniors de la Fifa, contre le Nigéria, est dure à avaler. A 16h 30, après un somme bien mérité, ils vont
fouler la pelouse du stade De Bilt, à quelques kilomètres de l’hôtel, pour un décrassage.
à entendre les joueurs, la déception a cédé le pas à la raison : "C’est clair nous sommes dégoûtés. Nous aurions pu arriver en finale, mais il n’y avait rien à faire contre le Nigéria. Trop fort", reconnaît Salah Sbai. Adil Hermach a vécu, lui, un rêve : "Les demi-finales sont une sacrée performance pour nous. Si nous avions perdu en 8ème de finale, je suis sûr que personne ne nous en aurait voulu".
L’entraîneur, Jamal Fathi, n’a pas apprécié que sa jeune équipe perde les pédales dans les dernières minutes, contre le Nigéria. Il comprend la nervosité des jeunots : "C’est une grosse déception de perdre, arrivé à ce stade de la compétition, mais il faut l’accepter. Les joueurs ont joué depuis deux mois non stop : au Panama, en Corée du Sud, en France, puis ici. Peut-être étaient-ils un peu fatigués ? Il nous reste un match contre le Brésil pour la 3ème place et nous ferons tout pour le gagner".
Quant aux deux expulsions et au geste malheureux de Iajour "Ce sont des erreurs de jeunesse et cela témoigne d’un amateurisme d’esprit, déclare le coach. Il ne faut pas leur en vouloir, la pression des fans, des médias était trop lourde à porter. D’autant plus que le Nigéria est une grande équipe. Et pas seulement par le talent…"
Dégoût ou colère, la délégation marocaine soutient, en effet, que les Nigérians n’ont pas moins de 20 ans, mais bien plus : "Ils ont enfreint le règlement en falsifiant leurs cartes d’identité. Vous avez vu comment ils sont bâtis ?", déclare Hassan Feziouatti, président de la commission centrale des jeunes. Les Hollandais avaient émis des protestations dans ce sens et les Marocains se sont plaints. La Fifa promet un examen médical lors des prochains rendez-vous.
Jamal Fathi retient néanmoins une satisfaction : "Je suis fier de mes joueurs et de leur parcours. C’est l’assurance d’une relève sûre. Iajour est l’avenir du football national". L’entraîneur adjoint et préparateur physique, Abdallah El Idrissi, ajoute : "Cette demi-finale n’est pas le fait du hasard. C’est le fruit de deux ans de travail".
Le mélange de Fathi
Au stade, devant des dizaines de fans et du petit Wassim, qui n’a raté aucun match des lionceaux, le coach a réuni ses poulains pour leur inculquer, en arabe, les vertus de l’humilité et du fair play : accepter la défaite, respecter l’adversaire et le public. "Wa drari ! le public a été fabuleux, très sportif. Il est venu de très loin pour vous, il a payé cher (le jour même, les places s’arrachaient à 100 euros au marché noir) pour vous voir. Aprenez à le remercier. Même si on perd !".
Il faut tirer son chapeau à Jamal Fathi qui a su, avec un flair hors pair, dénicher des perles rares comme El Zhar (à Saint-étienne) ou Msassi (Mas de Fès). Fathi a su bâtir une équipe mixte entre locaux (Iajour remplaçant de luxe au Raja, Bourkadi (Mas), El Amrani (Rachad Bernoussi) ou Rabeh (Fus) et des jeunes évoluant dans des clubs européens (Sbai joue à Charleroi, Tiberkanine à l’Ajax d’Amsterdam, Kantari au PSG, Hermach à Lens, Chichi au FC Cologne). Et la mayonnaise a bien pris. Au delà de la qualification, les Lionceaux ont développé un jeu offensif qui a régalé les dizaines de milliers de supporters. Battre le Japon et l’Italie n’est pas rien.
Pour Fathi, "Il y a deux catégories de joueurs dans l’équipe. La première vient de couches sociales moyennes et a un niveau d’instruction très moyen. Ces joueurs ont été formés au sein de leur club (Wac, Raja, Mas, Fus). Ils n’ont pas pu jouer beaucoup de matchs en cadet et junior à cause du manque d’encadrement technique et de structures au Maroc". La deuxième est celle "des joueurs européens qui ont pu concilier sport et études. Ils ont une solide culture footbalistique et une bonne mentalité sportive".
Tous ces gamins ont su mettre une bonne ambiance dans le groupe. Pas de cloisonnement entre locaux et les Européens. Tout le monde se mélange. Dans le car, ça chambre en arabe, en français, en hollandais et en allemand. Certains ne parlent pas arabe. à la réception, c’est Benzouien Sofian (qui évolue en Belgique), qui fait l’interprète. Nos lionceaux ont pour la plupart 20 ans. Les plus jeunes sont Iraki (17 ans), Chichi (17 ans) et Benzakoune (19 ans). Chacun essaie de se trouver un look. Yahia Iraki a les cheveux teints en blond. Mouhssine Iajour, walkman aux oreilles, et chaâbi à fond la caisse, se fait appeler Drogba, pour son look rasta, et est peu disert ; Abdessalam Benjelloun a la boule à zéro à la Ronaldo etc. Certains se sont déjà fait repérer par des clubs étrangers : L’Espagne lorgnerait sur Iajour et Marseille aurait des contacts avec Rabeh.
Pendant le petit match d’entraînement détendu entre les remplaçants, les joueurs s’appelent par leurs noms. Ils ne se connaissent pas tous encore. Paradoxalement, c’est aussi cela le tour de force de Fathi : "Parvenir à souder un groupe alors que ses 22 membres ne s’étaient réunis au complet qu’une seule fois pour un match amical contre le Canada, à Amiens, en mai dernier. Leurs clubs ou centres refusaient de les prêter sous prétexte que leur calendrier ne coïncidait pas avec celui de la Fifa". De retour à l’hôtel, l’entraîneur adjoint Abdallah Idrissi, consulte sur Internet les journaux marocains pour voir ce qui s’écrit sur les Lionceaux. Tout comme Jamal Fathi, il espère que l’accueil qui leur sera fait à l’aéroport de Casablanca sera chaleureux. Le contraire serait étonnant.
[telquel]